L’artiste Manoela Medeiros à l’honneur !
Chaque année, l’association parisienne d’artistes Jeune Création organise un appel à candidatures et une exposition pour présenter les œuvres d’une soixantaine de jeunes artistes contemporains internationaux. Pour la 67e édition, en 2017, L’Architecture d’Aujourd’hui a été invitée à sélectionner un artiste lauréat : la plasticienne brésilienne Manoela Medeiros. Née en 1991, elle vit et travaille aujourd’hui à Rio de Janeiro et à Paris. Rencontre.
L’Architecture d’Aujourd’hui : Votre travail met en relation l’architecture, la construction, la matière et l’installation artistique. Pourriez-vous expliquer votre relation à l’architecture et à l’art ?
Manoela Medeiros : Ce qui m’intéresse c’est arriver dans un lieu les mains vides et créer à partir de cet espace chargé d’une histoire et d’intentions. C’est pour cette raison que l’architecture de l’espace d’exposition, sa forme et sa lumière prennent une nouvelle signification durant mon processus de travail. Je cherche à mélanger les deux, de manière à ce que le public ne sache pas ce qui est « œuvre » et ce qui est « espace ».
AA : Quels messages souhaitez-vous véhiculer à travers vos œuvres, avec par exemple Paysage limite (2015) ou Hémisphère (2016) ?
MM : Je préfère plutôt suggérer de multiples chemins et histoires sur mon travail. Paysage limite et Hémisphère se rapportent à l’idée de construction et déconstruction. Dans ces œuvres, c’est la méthode utilisée pour leur réalisation qui apporte du sens.
Paysage limite utilise la ligne tracée par l’angle du mur comme une ligne d’horizon située à la verticale et qui séparerait le passé, le présent et le futur. Je creuse la superficie du mur de droite et j’utilise les fragments issus de cette excavation pour la partie gauche, dans une tentative de reconstruction du même périmètre. Ces actions me ramènent à la condition humaine : nous naissons dans un monde que nous ne construisons pas, puis nous réalisons au quotidien des constructions ou réorganisations de nouvelles ruines à partir d’anciennes ruines qui déjà ne nous servent plus.
Dans Hémisphère, la figuration est une donnée imposante du travail : l’image de l’Amérique du Sud creusée dans le mur et la reconstruction de l’Amérique du Nord sur le sol à partir des fragments tirés de l’opération d’excavation créent une relation de dépendance entre « l’excavé » et le « fragmenté ».
AA : Vous dites « À la croisée de différents médias mon travail utilise essentiellement la sculpture, la peinture, la performance et les installations ». Que préférez-vous ?
MM : Les travaux possèdent leur liberté propre pour exister dans le monde. Pour cela je cherche à ne pas limiter une idée à un médium. Je préfère laisser le dialogue toujours ouvert.
AA : Que représente, pour vous, l’exposition annuelle Jeune Création et qu’en attendez-vous ?
MM : L’exposition Jeune Création est une initiative forte car il s’agit d’un projet fait par des artistes pour des artistes. C’est important que nous, artistes, soyons constamment impliqués dans la création et la scène artistique qui nous parait pertinente. Sinon, nous pouvons nous retrouver dans un système dans lequel nous nous ne reconnaissons pas.
Entretien réalisé par Laurie Picout, novembre 2017