L’architecture du soin, de la cure au « care »
Au Pavillon de l'Arsenal, l'exposition Soutenir (Ville, architecture et soin), commissionnée par la philosophe et psychanalyste Cynthia Fleury et l'agence SCAU, explore les liens entre les questions de soin et d'urbanité. À découvrir jusqu'au 28 août 2022. Par Emmanuelle Borne
Le sujet est brûlant : la place du soin, du care, de l’acte thérapeutique dans nos sociétés pandémiques semble être enfin évaluée à sa juste mesure, même si elle est loin d’y être pleinement aménagée. Parmi les corollaires de cette prise de conscience, l’architecture du soin est enfin scrutée de plus près. Son histoire, son évolution, et l’impact qu’elle peut avoir sur notre santé, pour le meilleur comme pour le pire, font partie des sujets explorés dans le cadre d’une exposition rondement menée par la philosophe et psychanalyste Cynthia Fleury et l’agence SCAU (et notamment Éric de Thoisy, son directeur de la recherche) au Pavillon de l’Arsenal jusqu’en août prochain.
Le parcours de Soutenir (Ville, architecture et soin) est organisé autour de sept thèmes « qui forment autant de relations entre le soin, la ville et l’architecture ». Distances, Éléments, Formes, Frontières, Nécropoles, Hétérotopies, Inhabitables : ainsi énoncés, les sujets choisis ne disent pas grand-chose des multiples questions (dont, entre autres, la mise à distance de la maladie, les formes que peut prendre l’institution, la place accordée à nos morts et ce qu’elle dit de notre rapport au soin, etc.) et sommes des documents (plans, maquettes, photos, vidéos, dessins, etc.) qu’ils recouvrent. Que ce soit l’œuvre photographique d’Antoine d’Agata rappelant un passé confiné pas si lointain (Virus), les maquettes de «psychoarchitecture » des artistes Christophe Berdaguer et Marie Péjus montrant comment la maladie peut à son tour créer ses propres hétérotopies, cette émouvante toile d’Eugène Thirion, L’Origine des établissements hospitaliers à Berck-sur-Mer (1888), sur les soins nourriciers apportés à distance de la ville aux enfants malades… les formes et propos de Soutenir sont (trop ?) nombreux mais rendent sans nul doute accessible l’ensemble – et le mérite est là grand – à des publics très éclectiques. Sans oublier les portraits de neuf lieux franciliens dédiés au soin comme la mythique Île aux Cygnes.
In fine, ce que l’on retient de Soutenir c’est que certes, « la vulnérabilité est notre condition commune », que la ville rend malade mais, aussi, qu’elle peut soigner. De la cure au care, « les lieux et les architectures nous tiennent et nous soutiennent, plutôt qu’ils nous détiennent et nous contiennent ».
Cet article est issu de notre numéro 448 « Quelle ville demain ? » disponible sur notre boutique en ligne.
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