Jacques Ferrier à Rouen : architectures sur fond blanc
Les friches portuaires sont-elles autant de pages blanches laissées à la fantaisie d’édiles ou même d’architectes ? Jacques Ferrier préfère y voir un fond blanc. D’une simple nuance sémantique, l’architecte a esquissé, pour le siège de la Métropole Rouen Normandie, livré en juillet 2017, les contours d’un parti engagé.
Un article de Jean-Philippe Hugron, publié dans le N°427 (octobre 2018) de L’Architecture d’Aujourd’hui.
« Nous avons la ferme volonté de respecter la culture des ports. Ce sont des lieux marqués par de grandes lignes horizontales où hangars et équipements industriels y sont espacés les uns des autres. Ce sont des paysages d’objets qui se détachent sur le ciel », affirme Jacques Ferrier. Dès lors, l’architecte s’est appliqué à tracer « la silhouette d’une machine » pour abriter le siège de la Métropole Rouen Normandie, 8 300 mètres carrés installés rive gauche de la Seine. Dans un environnement de friches portuaires dominées par deux grues jaunes, un pont levant et des silos à sucre, la proposition prend tout son sens. Il y a même un mimétisme dans le dessin que l’architecte assume volontiers. « Nous sommes dans un rythme d’objets techniques », soutient-il.
L’urbanisme du quartier est, lui aussi, conditionné par ce passé portuaire et la proposition pour ces nouveaux bureaux devait impérativement reprendre les proportions d’une parcelle autrefois occupée par un hangar, le 108. « Respecter l’empreinte du passé et reproduire ses dimensions nous obligeait à concevoir une construction trop large pour accueillir des bureaux », note Jacques Ferrier. De fait, l’exercice se révèle plus délicat que prévu et invite l’architecte à imaginer quelques artifices pour répondre à la demande initiale. « Nous avons travaillé la forme pour générer, dans un premier temps, deux nefs accolées que nous avons ensuite glissées l’une par rapport à l’autre puis soulevées en symétrie. De ce jeu en maquette est née l’expression d’un double bâtiment », précise-t-il.
Ce parti volumétrique participe à la richesse spatiale de l’ensemble. Jacques Ferrier s’en saisit pour satisfaire son dessein de créer chemins et parcours à l’intérieur même d’un programme qui, sur le papier, se montre souvent des plus ennuyeux et répétitifs. Dans cette logique, les circulations sont donc plus généreuses. Elles accueillent par endroits des assises et offrent systématiquement des perspectives inattendues sur terrasses et patios.
L’architecture se fait alors riche de situations et Jacques Ferrier démultiplie les surprises qu’il ménage à l’aide d’une ingénieuse structure en métal enveloppant l’ensemble. « Elle a l’élégance de sa rudesse », dit-il. Elle se fait surtout le support de panneaux photovoltaïques et de vitrages aux reflets irisés. « Cette matérialité traduit la pensée actuelle sur l’alliance de la technique et de l’émotion. » L’effet est, sans conteste, pictural. « Je ne pouvais donner à ce projet qu’une seule esthétique industrielle, prévient-il. Une fois que la question de l’architecture portuaire avait été intégrée dans la volumétrie et la présence du bâtiment, il m’est apparu essentiel d’y inclure un aspect culturel. » Rouen évoque les impressionnistes, et la cathédrale les peintures de Claude Monet. « C’est l’une des premières peintures en “séries”. Un même angle de vue sur la façade flamboyante de la cathédrale a été reproduit sur différentes toiles pour montrer combien le bâtiment pouvait au fil des heures et des saisons changer de couleur. Je voulais trouver le moyen d’offrir un bâtiment qui change, lui aussi, de teintes », explique l’architecte.
Si la référence était toute trouvée, l’architecte s’en joue subtilement pour mieux la transformer. « Les impressionnistes partaient de l’émotion et de la peinture pour aller vers la technique. Nous voulions, à l’ inverse, partir d’une technique pour aller vers le sensible », indique-t-il. Le verre se fait alors dichroïque ou interférentiel. Autrement dit, il présente, selon l’éclairage, deux teintes différentes. Les couleurs sont même d’autant plus prononcées que le ciel est gris ; de quoi sans cesse émerveiller.
Jacques Ferrier et son agence poursuivent cette réflexion sur les espaces portuaires à travers un autre projet, le terminal de croisière de Sète. « Notre proposition cherche à donner la possibilité de redécouvrir un port toujours en activité », souligne l’architecte qui regrette ainsi que darses et quais soient devenus de véritables enclos protégés et déconnectés de la ville. Aussi, par une proposition audacieuse, une nouvelle fois empreinte d’un imaginaire maritime, il tente, par l’architecture, de répondre à une problématique urbaine… le tout, sur fond blanc. ■
Les variations de couleur obtenues grâce aux écailles de verre diffractant la lumière solaire qui recouvrent le bâtiment sont directement inspirées de toiles de Claude Monet.
La couche d’oxydes métalliques qui recouvre le verre en façade offre un aspect iridescent qui s’efface vu de l’intérieur, pour ne pas altérer la vision des espaces de travail.
Répartition des panneaux de verre dichroïques. Selon l’angle de vue, chaque panneau a deux nuances différentes. Côté Seine, près de 5 400 lames de verre coloré – 12 teintes au total – recouvrent 2 000 m² de façades et toiture.
Coupe longitudinale.
Plan du cinquième étage.
Plan du rez-de-chausseé.
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Siège de la Métropole Rouen Normandie
Rouen, France
Maîtrise d’ouvrage : Métropole Rouen Normandie
Architecte : Jacques Ferrier Architecture
Co-traitants et BET : Studio Pauline Marchetti et Sensual City Studio (signalétique, design et scénographie du hall), C&E ingénierie (structures), Sogeti (fluides, économie de la construction), ACV (acoustique)
Programme : siège de la Métropole Rouen Normandie : bureaux, espaces de réunion, de réception et d’exposition
Superficie : 8 300 m²
Calendrier : Concours : 2013 / Livraison : 2017
Coût : 25 millions d’euros HT
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Mauvais article. Les habitants historiques de cette place n’en pouvaient plus de ce qu’elle était devenue et rêvaient d’avoir une place piétonne.
De plus, comparer la Plaine à Noailles et la Belle de Mai d’un point de vue sociologique démontre un grand manque de sérieux de l’auteur.
Je suis désolé, mais ces murs n’ont pas été construits pour protéger la place de ses habitants mais plutôt pour empêcher des opposants à la rénovation de saboter le chantier, qui ne sont pas des habitants de la plaine, pour la plupart d’entre eux.
Ce projet vous paraît fade, et il l’est un peu aussi à mes yeux, mais rendre la plaine aux piétons est miraculeux, et rien que pour ça, je soutiens ce projet. La seule bêtise a ranger dans un musée est celle de ces opposants révolutionnaires qui ont eu la bonne idée de transformer en drame shakespearien ce qui ne devait être qu’une pièce de théâtre de boulevard, pour le plus grand bonheur de quelques acteurs ratés en manque de représentation qui composent ces opposants.
La plaine était une poubelle rien à voir avec un quartier populaire,viol, crimes ,le mur est la pour protéger le chantier ,les ouvriers et les vigiles constamment attaqué , sans parler des commerces dévasté lors des attaque des » opposants » la plupart des gens qui habitent ou travaillent sur la place sont pour ce projet,qui a de toute façon commencé tout sera mieux que ce que nous avions avant , après les travaux on aura une place semi pietoniser ,plus d’arbres ,des jardins pour enfants , donc je vous le demande ,où est le problème ?
Assimiler habitants et opposants, c’est relayer ceux qui crient le plus fort sans écouter la majorité des habitants qui sont pour ces travaux. Vous qualifiez de « sans saveur » la pietonisation d’un parking géant en plein centre-ville, vous trouvez « chiant » de verdir un espace bétonné, et vous cautionnez les violences « poétiques ». Curieux de savoir ce que vous auriez proposé. Ne répondez pas « j’aurais concerté » car cela ne vous a pas échappé, tout le monde ne veut pas la même chose à la Plaine. Donc vous auriez fini menacé de mort comme les personnes impliqués dans le projet et vous auriez trouvé ça moins poétique comme contestation.