La cartographie poétique d’Armelle Caron
Du 19 septembre au 6 octobre 2024, la ville de Rennes accueille, pour sa deuxième édition, le Festival Georges, une biennale d’architecture organisée dans les rues rennaises par la Maison de l’architecture et des espaces en Bretagne (MaeB). La rédaction de L’Architecture d’Aujourd’hui est heureuse de renouveler son partenariat avec l’événement. Pour l’occasion, est allée à la rencontre des différents intervenant·es, artistes, architectes, designers pour qu’ils et elles racontent leur vision du thème de cette année : les limites. Rencontre avec l’artiste Armelle Caron, qui a réalisé plusieurs types d’images pour le festival, ainsi qu’une intervention dans l’espace public.
Propos recueillis par Rachel Sablé
Pourriez-vous présenter en quelques mots votre intervention pour cette nouvelle édition du festival Georges ?
Le festival Georges m’a invité à produire plusieurs types d’images, le visuel pour l’affiche, la carte sensible du festival lui-même et une intervention le 22 septembre dans l’espace public à Rennes.
Pour l’affiche j’ai voulu brouiller un peu les pistes en jouant avec les codes graphiques de la cartographie et les échelles de représentation. Le dessin du papier-froissé sous-entend une topographie accidentée, montagneuse qui ne colle évidemment pas avec la réalité de Rennes. C’est cette ambivalence qui me plaît, de mettre chacun·e dans un espace intermédiaire entre le réel et ce que qu’on pense être son image. C’est dans cet interstice que la poésie peut exister, et j’essaie de m’y glisser.
Quant à la carte du festival, c’est un objet plus pragmatique, plus réellement cartographique. Nous avons choisi de ne garder que ce qui nous paraissait essentiel à la fois pour se repérer et pour ce qui est à saisir lors du festival. Sont donc représentés la voie ferrée, les rivières, les espaces verts, les bâtiments qui accueillent le festival, mais également les bâtiments actuellement en transition et les parcours que le festival a mis en place pour découvrir autrement la ville et ses limites.
La troisième partie de mon travail est une intervention dans l’espace public qui reprendra la typologie graphique de la cartographie, mais à une échelle tout autre. Le corps sera inclus dans le processus. On vous laisse la surprise !
Cette année, le festival invite à « explorer les limites ». Comment comprenez-vous cette consigne, dans le cadre de votre travail ?
Le thème du festival de cette année, « explorer les limites » est vraiment intéressant. D’un point de vue cartographique la limite nous fait penser à un trait, à quelque chose de précis, de net, à une incision dans le réel. Mais dès qu’on y pense un tout petit peu, dès qu’on se projette soi-même dans ce qu’on devrait définir comme un espace, alors tout devient très flou. Un quartier ne s’arrête pas si simplement au bord du trottoir ou de l’autre côté de la place, seule l’administration arrive à tracer des lignes. Quand je pense aux limites, je pense tout de suite aux effets de sfumato de De Vinci ou à la théorie des ensembles. En tout cas j’imagine des recouvrements, des chevauchements, des transparences. Parfois les événements géographiques comme une rivière, une crevasse ou la lisière d’un océan peuvent apparaître comme des limites. Quoi qu’il en soit dans mon travail ou dans le réel je les espère toujours franchissables. Je mets tous mes espoirs dans la porosité.
Selon vous, où réside l’intérêt d’un « festival d’architecture » ?
Je trouve ça très pertinent de proposer aux usager·es d’une ville de la regarder de plus près. L’architecture est notre quotidien. En tant que citadine, moi-même je me sens parfois comme à l’intérieur d’une matriochka. Nous habitons dans un certain nombres d’espaces imbriqués les uns dans les autres, d’abord dans notre peau, puis dans les murs de notre logement, dans notre rue, notre quartier, notre ville, etc… Le festival Georges va pouvoir interroger ces différents espaces, en proposer une lecture et je suppose que cela peut nous aider à nous comprendre. En tous les cas, le festival va emmener ses visiteurs à décaler leur regard et penser différemment la ville de Rennes.
Festival Georges, du jeudi 19 septembre au dimanche 6 octobre 2024, à Rennes.
Pour plus d'informations, rendez-vous sur www.georges-festival.com