Les fantômes de Bucarest
Cet article de Jean-Philippe Hugron est extrait du n°428 d’AA – Commandes privées, vocations publiques – paru en décembre 2018.
Youssef Tohmé vient de livrer à Bucarest le premier musée d’art privé de Roumanie, le MARe (musée d’Art récent), initié par son associé, l’homme d’affaires libanais Roger Akoury. Ce dernier a jeté son dévolu sur une maison autrefois occupée par Ana Pauker, ministre des Affaires étrangères de 1947 à 1952.
Cet oeil de Moscou avait laissé, après son décès, une étrange bicoque, aussi fantasque que biscornue, construite au détour des années 1930. Transformer cette adresse lestée du poids de l’histoire n’était donc pas une mince affaire. Youssef Tohmé prend le parti étonnant de démolir pour mieux reconstruire. « Comment produire de l’architecture dans une ville connue pour ses destructions et où la population a si longtemps été contrariée dans son pouvoir de mémoire ? » s’interroge l’homme de l’art. En conséquence, il décide de reproduire, en brique noire, l’exact volume de l’ancienne demeure. Il y imagine, en revanche, des espaces différents et une distribution autrement plus adaptée à la présentation d’oeuvres, mais aussi à l’accueil de visiteurs. In fine, en captant l’essence même de Bucarest, Youssef Tohmé en livre le plus subtil symbole.
Le n°428 d’AA – Commandes privées, vocations publiques – est disponible sur notre boutique en ligne.